Nirvana : L'histoire controversée derrière le morceau "In Bloom"

Nirvana : L'histoire controversée derrière le morceau "In Bloom"

Une chanson qui mis le groupe dans une nouvelle dimension !

Avec Nevermind, le succès de Nirvana explose en 1991. Porté par des morceaux devenus cultes, cet album propulse le trio de Seattle au sommet du rock alternatif. Parmi ces titres emblématiques, In Bloom occupe une place particulière : à la fois accrocheuse et corrosive, cette chanson est l’un des morceaux les plus connus du groupe de Kurt Cobain. Pourtant, derrière ses apparences pop, elle cache une critique acerbe – et profondément ironique – de leur propre public.

À l’époque, Nirvana voulait incarner un groupe non conventionnel, enraciné dans la scène grunge de l’underground américain. Mais très vite, le succès commercial et l’attention des majors les transforment malgré eux en un groupe mainstream. Tout ce qu’ils avaient juré de ne jamais devenir. C’est précisément ce paradoxe que In Bloom tente de raconter : une critique en musique, habillée d’un refrain entêtant que tout le monde peut chanter... sans vraiment en saisir le sens.

Krist Novoselic, le bassiste du groupe, résume bien cette tension créative : « À l'origine, ça ressemblait à une chanson de Bad Brains. Puis Kurt l’a transformée en chanson pop. » Ce mélange inattendu entre l’agressivité du grunge et des sonorités plus accessibles donne naissance à une œuvre ambiguë, à la frontière entre rébellion et concession.

Selon le magazine Far Out, le morceau n’a été répété qu’une seule fois avant que Kurt et Krist ne se lancent dans l’enregistrement d’une première démo. Cobain voulait aller vite, capturer une idée avant qu’elle ne lui échappe. Il emporte donc l’enregistrement chez lui et commence à le retravailler obsessionnellement, testant plusieurs versions, appelant Krist au téléphone pour lui faire écouter chaque essai. Il cherchait désespérément le bon rythme, la bonne balance. Finalement, une version est retenue et In Bloom est incluse dans le CD promotionnel envoyé aux grandes maisons de disques. Un pari qui paie : quelques mois plus tard, Nevermind est dans les bacs.

In Bloom y figure en deuxième position, juste après Smells Like Teen Spirit. Un choix stratégique, presque ironique, tant les deux morceaux incarnent l’âme de Kurt Cobain : à la fois attiré par la célébrité et profondément mal à l’aise avec ce qu’elle implique. « Il était très secret sur ses paroles », expliquait Novoselic dans Rolling Stone. « On peut y lire ce qu’on veut... Je dirais que Kurt est un moulin à vent. Il voulait être une rock star, mais il détestait l’être. Ce sentiment a scellé son destin, et s’exprime intrinsèquement dans la chanson In Bloom. »

Au moment de sa création, la popularité de Nirvana montait en flèche. Les petits clubs crasseux se remplissaient peu à peu, et le public changeait. Ce changement ne pouvait passer inaperçu pour un artiste aussi sensible que Cobain. Il voyait désormais des fans qui reprenaient ses refrains sans même comprendre qu’ils étaient parfois les cibles de ses textes. Ce sont eux qu’il vise dans In Bloom : les nouveaux arrivants, ceux qui « aiment chanter nos chansons » sans en capter le message.

In Bloom, c’est donc plus qu’un tube. C’est un cri étouffé, une satire du système qui a propulsé Nirvana vers les sommets tout en broyant peu à peu l’âme de son leader.